Émissaire de la terre crue

Chercheuse spécialisée dans les écomatériaux, directrice de l’atelier amàco, Laetitia Fontaine participe à redonner ses lettres de noblesse aux matériaux de construction écologiques. Une bonne nouvelle pour la planète !  

« Abondante et recyclable, la terre crue possède des qualités reconnues depuis des siècles à travers le monde. Elle concourt à la régulation hygrothermique et a un excellent bilan carbone puisqu’elle est disponible localement et ne réclame ni transformation ni cuisson », annonce d’emblée Laetitia Fontaine. Quadragénaire pétillante, cette scientifique exaltée, maman de trois enfants, affiche un beau parcours. Native de Bourg-en-Bresse, élève modèle, elle intègre après le baccalauréat l’Institut national des sciences appliquées (INSA) de Lyon. Son diplôme d’ingénieure en poche, elle entre en 3e cycle à l’École d’architecture de Grenoble où elle « retrouve le goût des sciences et de la recherche ». 

Laetitia Fontaine en mission à Ghadamès en Libye. © DR
Recherche scientifique

Au sein du laboratoire CRAterre de l’École nationale supérieure d’architecture de Grenoble (ENSAG) , elle se lance dans l’étude du matériau terre. La naissance d’une vocation ! Elle débute alors une thèse sur les constructions en terre crue. En laboratoire derrière un microscope ou sur le terrain lors de missions en France et à l’étranger, elle cherche, avec son collègue Romain Anger, à promouvoir « les matériaux de construction écologiques ». « Nous avons testé les recettes traditionnelles, redécouvert comment fluidifier ou modifier les propriétés de la terre en lui adjoignant des substances organiques, d’origine animale ou végétale », rappelle la chercheuse. Un travail couronné par une bourse L’Oréal-Unesco en 2009. Grâce aux 10 000 euros de récompense, elle participe à un congrès international au Mali, réalise des voyages d’études en Afrique, prépare des expositions...

Mobilisation écologique

Ses recherches, sa persévérance paient. « Si j’ai renoncé à finaliser ma thèse pour des raisons familiales et professionnelles, je suis fière d’avoir contribué à un changement de paradigme. Avant, la terre était considérée comme un matériau désuet et dépassé. Aujourd’hui, elle a retrouvé une légitimité », s’enthousiasme l’ingénieure qui est également directrice de l’atelier amàco. Forte d’une quinzaine de salariés, l’association accompagne le développement des filières de matériaux en terre crue et en fibres végétales, forme les professionnels et les étudiants des secteurs de la construction, de l’architecture et du design au bon usage de ces matériaux écologiques, valorise la terre crue via des expositions, des livres, des conférences ou encore des MOOC*...

Après le premier confinement**, le secteur du bâtiment est reparti de plus belle et avec un nouveau regard sur les enjeux environnementaux, donc sur le matériau terre. « Le défi est désormais de répondre aux besoins croissants de formation en écoconstruction et en rénovation du patrimoine », s’enthousiasme Laetitia Fontaine. Autre projet pour 2021 : la mise en service, à Sevran, d’une fabrique de briques, de panneaux et d’enduits à base de terre crue. Une première en France !

* cours d’enseignement diffusé sur Internet
** du 17 mars au 11 mai 2020

 

Diaporama

Présentation

  • Nom : Fontaine
  • Prénom : Laetitia
  • Née le 17 octobre 1978 à Bourg-en-Bresse
  • Profession : ingénieure spécialisée dans les matériaux de construction, chercheuse au laboratoire CRAterre-AE&CC de l’ENSAG et directrice de l’atelier amàco. Co-auteure, avec Romain Anger, du livre Bâtir en terre – Du grain de sable à l’architecture paru aux éditions Belin en 2009 à l’occasion de l’exposition Ma terre première présentée à la cité des sciences et de l’industrie.
  • Diplômes : ingénieure matériaux à l’INSA de Lyon ; diplôme de spécialisation et d’approfondissement en architecture de terre (post-master) au laboratoire CRAterre-AE&CC de l’ENSAG.

Sa vision de la femme

Dans le secteur du bâtiment, l’enjeu de l’égalité des sexes est encore très fort. Si, dans les écoles d’architecture, les femmes sont aujourd’hui majoritaires et si, dans les écoles d’ingénieurs, on se rapproche de la parité, tous les métiers de chantier restent très masculins.